Texte n°5 :
L'Aquilon. Il rentre en moi, me transmet son désarroi. Il cherche un peu de chaleur auprès de mon cœur. Son souffle se renforce alors que l'aube brille, pourtant, d'un bel éclat.
Entre ces deux entités, c'est le divorce ; et moi j'y assiste, comme si je me trouvais à un gala.
Il n'est rien de tel à admirer que la bise glaciale du Grand Nord. L'Aquilon fait ployer navires et galères en terribles vindictes, afin de punir les hommes téméraires, qui ont décidé, un jour, de saisir ses terres.
Ne s'arrête sa Loi qu'aux rares personnes comprenant sa Voix, car l'Aquilon est intense, l'Aquilon est éloquence.
Texte n°6 :
Radiant devait se lever tôt pour partir au travail. Mais d'un naturel paresseux, c'était généralement son amie, Claire, qui prenait soin de le réveiller.
— Hé, réveille-toi, tu dois y aller...
— Hmpf... Pas envie aujourd'hui...
Elle le réprimanda vivement :
— Il n'y a pas le choix. Tu crois pas que, moi aussi, j'aimerais de temps en temps prendre un congé? Bah non. Jamais. On a besoin de nous.
Radiant remua dans sa couette de nuées avant de marmonner imperceptiblement :
— M'ouais, m'enfin, tu fais pas grand chose à ce qu'on dit...
— Hein? Comment ça? Et peut-on connaître tes sources, très cher?
— Ben, les Filantes pardi ! Tu crois quoi? Que t'es transparente?
Claire minauda dans son coin avant de se reprendre :
— Les sales petites pimbêches, elles vont voir ce soir... Enfin, peu importe, tu dois te lever. Déjà hier, tu avais deux minutes de retard.
Radiant prit une mine exaspérée :
— Oh la la ! Deux minutes, comme c'est grave !
Puis il tenta de se recoucher. Ce qui redoubla la fureur de Claire à son encontre.
— Ah non ça suffit maintenant ! Debout ! D'autres personnes t'attendent figure-toi ! Tu ne dois pas les faire languir davantage.
Elle le secoua à lui en faire voir des étoiles au-dessus de la tête. Finalement, il capitula devant la motivation de son amie :
— Ok ok, c'est bon, j'y vais.
Claire, après s'être assurée qu'il ne l'entourlouperait pas, prit congé de lui pour se reposer.
Radiant alors entreprit ce qu'il faisait chaque jour : il envahit l'infini des cieux de sa présence, pour y culminer quelques temps après. Et tout en traçant sa route, il innerva la vie sur Terre. Les hélianthes se réjouirent de son ardeur et lui tendirent leur corolle en guise de remerciement. Mais aussi, il insuffla joie et bonheur aux vaillants travailleurs matinaux, en même temps qu'il tempéra le sol d'où jaillissaient nos cucurbitacées préférées. Les arbres, qu'il stimula également, fructifièrent abondamment pour l'engouement de toutes les autres espèces.
En soit, tout cela le dépassait, lui échappait. Mais lui seul était capable d'accomplir pareils exploits.
Une fois l'horizon parcourue, il prit repos et laissa sa vespérale amie, Claire, prendre le relais.
Il en allait ainsi depuis le commencement, depuis que le Temps leur avait donné naissance, et désignait pour veiller sur le reste de l'univers.
Et tant qu'on aurait besoin d'eux, ils seraient là, à attendre, résilients, comme des fantassins et leur fidèle pavois cristallins, armés de leur foi séraphique, sempiternelle.